La mort atroce le 3 août 2016 d’un pensionnaire de l’EPHAD [structure pour la dépendance… en principe sécurisée], l’ « épidémie » de décès de bébés prématurés (5… officiellement) dus à des staphylocoques (merdes microbiennes) dans un service étrenné en grande pompe, soi-disant à la pointe de la modernité, 6 morts donc causés par des facteurs exogènes à leur état. Aucune démission ? Malaise. D’aucuns diraient carton rouge !
La Poste dont la communication ambitieuse ne parvient pas à cacher les affres du terrain. Le service aux usagers : accueil des personnes, traitement des courriers, délivrance des colis postaux… trop souvent soumis à une caste minoritaire dont l’efficacité professionnelle est fonction de son intérêt personnel, sa connaissance de l’usager ou de son… état d’esprit du moment. Aucun dynamisme économique efficient tant que la circulation – pourtant payante – des informations et des marchandises sera arbitrairement freinée.
La justice en Guyane d’être incapable de prévenir la récidive. Certes, les criminels sont arrêtés et sont lourdement sanctionnés. Mais trop nombreux sont les délinquants qui cumulent interpellations, rappels à la loi, condamnations (dans les faits aussi théoriques pour les intéressés que démotivantes pour les forces de l’ordre). Il est déjà tard : l’impunité domine la peur du gendarme.
La sécurité n’est pourtant pas l’ennemie de la liberté. Elle en constitue la première condition.
Notre système scolaire de poursuivre sa logique aveugle. Un rapport récent (CNESCO, objet d’une future chronique) démontre que toutes les politiques prioritaires menées (ZEP, éclair, REP…) sont non seulement un échec en termes de résultats mais un viol même de leur essence : combattre les inégalités. Plus que les acteurs, c’est le système qui doit se régénérer : calendrier, formation des personnels, pilotage réel et partagé, dialogue social, objectifs réels même si moins ambitieux reposant sur des contraintes identifiées, rôle des parents….
Le mot autonomie existe. Rendons le réel.
La vie chère artificielle, créature d’acteurs monopolistiques ou d’ententes cachées. Le travail formidable réalisé par l’association des consommateurs de Guyane (voir site Facebook) montre bien que derrière les arguments fallacieux de l’octroi de mer et autres taxes, se cache le dessein de l’égoïsme capitalistique : bouffer grassement (téléphonie, numérique, bricolage, pièces auto…) sur le dos des consommateurs avec des marges telles que le mot indécence n’a même plus de pertinence.
Les politiques de la ville qui sous prétexte de pallier la pénurie de toits menacent par l’empilement de bâtiments la cohésion sociale, le vivre ensemble. Les embouteillages sont une violence comme l’absence d’espaces verts, de places publiques, de transports collectifs fiables, …
Entasser pour mieux taxer (taxes foncières, d’habitation). On a connu politique publique plus sensible à l’intérêt général et plus ambitieuse en termes d’aménagement du territoire.
Et je m’accuse. Je m’accuse de perdre mon humanité, petit à petit mon âme. D’hurler avec la meute des cerveaux reptiliens la peur de l’Autre, la peur de perdre mes acquis, mon train de vie, mon confort, ma sécurité… sensible au discours de « on ne peut pas accepter toute la misère du monde » alors que la Turquie accueille près de 2 millions de réfugiés et nous à peine quelques dizaines de milliers.
Dans l’absolu, le lieu de naissance, la couleur de peau… ce qui en découle (école, santé, sécurité, emploi…), n’est que hasard, l’hypothèse magique de la vie. Qu’aurais-je fait si j’avais été Syrien, Erythréen, Soudanais… ? Aurais-je accepté pour moi et les miens une vie de misère, une vie menacée où aurais-je pris tous les risques pour obtenir une vie meilleure dans un autre pays ?
J’étais attablé dans une terrasse de café. Des voisins de table déclaraient d’une même voix : « les réfugiés syriens, ouais, bah, les gars-là, plutôt que venir chez nous, il aurait dû prendre les armes chez eux ». Ici, point de bruit de bombes. Juste le fracas mélodieux du ressac maritime. Je les observais, ventres bedonnant, bermudas flottants, tongs en éventail et bières suffisantes pour clamer des certitudes. Comme l’illusion d’une France unanimement résistante en 40.
Farouk AMRI