La Belgique et la France, c’est un long roman d’amitié, de mauvaises blagues et de frustrations mal placées entre deux pays collés l’un à l’autre, comme une moule à son rocher …
Allo ? Oui dites, c’est une Belge qui vous parle, qui ne saurait pas (j’insiste) vous chanter la Brabançonne par cœur ni décliner les noms des innombrables et inutiles ministres de son pays, partagés entre flamands et francophones. D’ailleurs, eux-mêmes ne s’y retrouvent pas. Il suffit de se remémorer un grand moment de solitude, lorsque notre premier ministre de l’époque a chanté la Marseillaise lors de la fête nationale belge, oui je vous jure, ce n’est pas une blague belge. Et puis, souvenez-vous, la Belgique a quand-même battu le record du monde du pays ayant tenu le plus longtemps sans gouvernement, et sans moufter ! Et oui, le belge est tempéré, comme son climat.
Mais ce n’est pas ce genre d’incident qui va diminuer ma fierté patriotique. Pourquoi ? Ben… la Belgique est le plus beau et formidable pays du monde ! Il fait un soleil éclatant et un ciel azur garantis vingt-cinq jours par an, le peu de relief permet de ne pas sukkeler (avoir des difficultés) dans les côtes, et on peut se rendre dans les forêts ardennaises ou à la mer du Nord en moins d’1h30.
Et puis, son peuple, le plus brave de tous les Gaulois, tout de même ce n’est pas rien ! Le Belge est tellement sympathique, pour ne pas dire gentil, il a tout pour lui, cette allure fière, ce teint de pêche, cet accent coloré (qu’on reproche à certains de ne pas avoir), et puis surtout il a toujours la frite (la pêche), il concocte des mets fins de carbonades flamandes, de vol-au-vent, de boulets-sauce lapin, et j’en passe. Alors pourquoi voudrait-il aller ailleurs, et surtout pourquoi la France ?
Si les policiers flamands qui ont ramené en stoemenlings (en cachette) les réfugiés à la frontière française ont dépassé la limité de quelques mètres, c’est sûrement à cause de notre unité de mesure, un peu skive (de travers), mais soyez certains qu’ils ne voulaient en aucun cas y mettre un pied. Et bien entendu, ça été géré en grande pompe par leurs homologues français souvent un peu steif (coincés) sur les bords, alors franchement messieurs, pétez un coup !
Je me permets donc de répondre aux piques lancées par un peï (type) d’un certain journal franco-guyanais, qui est franchement très mal renseigné, ou du moins, comprend tout de travers. Ah parce que pour vous plaindre, vous êtes forts, même reconnus mondialement. Et se plaindre de l’envahissement de tous ceux qui ne sont pas français pure souche (ça veut dire quoi ça ?), c’est votre grand truc en ce moment. Mais venez voir par vous-même, en Belgique, personne ne se plaint !
Les Belges sont conciliants, patients, et surtout très accueillants, notamment avec vous Chers Français ! Et on a tout intérêt à l’être, car vous êtes de plus en plus nombreux à passer la frontière pour venir étudier, acheter nos maisons de maîtres art-nouveau (faisant grimper les prix), tourner vos films chez nous parce que vous bénéficiez de réductions fiscales, tout en faisant croire que c’est la France.
Vous nous usurpez même nos plus grands talents, et pas n’importe lesquels : Bernard Arnault, Eric-Emmanuel Schmidt, Depardieu, Arthur et j’en passe. Quel culot, vous les bouffeurs de baguettes, qui voyagent mal, comme leur camembert… (pardon, une vieille blague de chez nous).
Enfin, je me permettrai de corriger le terme « tonguekini » en slachekini, car la slache (tongue) est sacrée chez nous.
Mais après nous avoir ri au nez, vous vous êtes vite attachés, ah ben oui, et puis Bruxelles, la belle, vous fait penser à Paris, en moins chère, moins stressée, plus agréable en somme. Après quelques jours chez les Brusseleirs (patois bruxellois), après avoir vu l’Atomium (monument national), goûté de vraies frites sauce samouraï (secret de la double cuisson), des mitraillettes (baguettes remplies de viande, de sauce et de frites en guise de munitions), de bières spéciales (plus de 400), et de sirop de Liège sur ce merveilleux fromage puant de Herve, sans oublier nos pralines à tomber par terre, vous finissez par vous y plaire, et vous dire qu’on a tout compris.
D’ailleurs nous nous surprenons encore de jour en jour. Quelle ne fut pas ma surprise, lors d’une balade à vélo dans la capitale en août dernier, lorsque je me suis retrouvée face à une statue de « moule-gaufre » géante (photo à l’appui). Une preuve encore de notre humour décalé et de l’autodérision typiquement belge.
Rrroo (bien rouler les « r »), je vous avais prévenu, il ne fallait pas chercher une Belche ! Surtout après être retournée un mois dans sa douce patrie, remontée à bloc en gaufes au suc’ et en stoemp-saucisses pour rentrer dans la doef (chaleur) de la Guyane, qu’elle a envahi en suivant son mec (belge aussi, c’est une valeur sûre). Et vous, « les Métros », vous ne déborderiez pas aussi de vos frontières ? Ça ne fait pas très français la caïpi, le tatou grillé et les carbets-bâches ! Ne l’aurait-on pas tous envahie à notre manière la Guyane ? Bon, c’est de bonne guerre chers amis zinneke (qui vient de plusieurs cultures), car qui aime bien, titille bien.
Et sur ces bonnes paroles, j’emprunterai l’expression de l’un des vôtres : « au revoir ».