Nouveau rebondissement en Haïti. Le premier tour de l’élection présidentielle d’octobre 2015 pourrait être annulée, et réorganisé pour octobre prochain.
Alors que le président provisoire de la République d’Haïti, Jocelerme Privert, a décidé de laisser le soin à l’Assemblée nationale de décider de prolonger ou non son mandat censé prendre fin le 14 juin, la commission indépendante de vérification et d’évaluation électorale a recommandé ce lundi l’annulation du premier tour du scrutin d’octobre 2015, en raison des fraudes constatées.
Le président du Conseil Electoral Provisoire (CEP), Léopold Berlanger, a annoncé dans la journée d’hier que le premier tour se tiendrait le 9 octobre. Si personne n’obtient une majorité de voix, un deuxième tour opposant les deux candidats ayant récolté le plus de votes devra se dérouler le 8 janvier 2017.
En octobre 2015, lors du premier tour de l’élection présidentielle, le candidat Jovenel Moïse du parti Tèt Kale de l’ancien président Michel Martelly était arrivé en tête, avec 32,8% des voix. Un résultat considéré comme frauduleux par son principal rival Jude Célestin (25,3%) et l’opposition, conduisant la République d’Haïti au blocage de son processus électoral.
Les législatives qui s’étaient tenues le même jour et donc dans les mêmes conditions, pourraient elles aussi faire l’objet d’une remise en question. “Le conseil a décidé d’examiner, au cas par cas, 42 dossiers concernant des députés et sénateurs, signalés au CEP par la commission dans son rapport”, a poursuivi Léopold Berlanger sans nommer les 3 sénateurs et 39 députés concernés. Ceux-ci seraient impliqués dans des affaires de corruption et feraient partis d’anciens membres du gouvernement ou de l’ancien CEP…
Au-delà des fraudes présumées et des conséquences judiciaires qui pourraient en découler, l’organisation de ce nouveau scrutin va de nouveau retarder la mise en place d’un gouvernement et le retour – espéré – à la stabilité politique. Les difficultés économiques et structurelles du pays demeurent (grèves des hôpitaux en raison du manque de moyens) et Haïti subit toujours la colère des éléments (pluies et inondations en mai).
La communauté internationale attentive
La Mission d’observation électorale de l’Union Européenne, ou le Département d’Etat Américain pour Haiti n’ont pas commenté la décision d’annuler le premier tour du scrutin, mais ont souhaité que le processus électoral reprenne au plus vite. “Nous ne savons pas encore quand ils vont réaliser les élections mais nous espérons qu’ils le fassent assez vite parce que nous sommes impatients de continuer notre partenariat avec Haïti” a indiqué Kenneth Merten, le coordonnateur du gouvernement américain. L’Europe a de son côté renvoyé plusieurs de ses observateurs en Haïti pour “évaluer le progrès accomplis pour relancer le processus électoral”.
Le CEP n’a pas pu indiquer le budget global de ces opérations électorales mais ce long processus représente une dépense exceptionnelle que le pays le plus pauvre de la Caraïbe ne peut pas assumer seul. Pour les élections – avortées – de 2015, près de 100 millions de dollars avaient été majoritairement financés par la communauté internationale. Un tel coût fait débat alors que la participation citoyenne est très limitée : au premier tour, moins d’un quart des électeurs ont voté.